terme approche. Je dois m’éloigner ; mais prends dans tes bras[1] en mon nom, l’enfant qui nous va naitre.
ALCMÈNE. Quelle est donc, cher mari, cette affaire si pressante qui t’appelle loin de ta demeure ?
JUPITER. Oh ! ce n’est pas lassitude de toi ni de notre maison ; mais quand un général en chef n’est plus à son armée, on est plus prompt à faire le mal que le bien.
MERCURE, à part. Il faut avouer que voilà Un habile enjôleur ; c’est le digne père de Mercure. Voyez comme il va gentiment cajoler la bonne dame.
ALCMÈNE. Ah ! je ne vois que trop ce que vaut à vos yeux votre femme.
JUPITER. Ne te suffit-il pas d’être chérie entre toutes ?
MERCURE, à part. Par Pollux, si l’autre[2] savait tes galantes occupations, tu voudrais être Amphitryon plutôt que Jupiter.
ALCMÈNE. J’aimerais mieux des preuves de ta tendresse que de belles paroles. Tu pars, et ta place dans notre lit est à peine tiède ; tu arrives hier au milieu de la nuit, et déjà tu t’éloignes ; puis-je être bien contente ?
MERCURE, à part. En avant ! il faut que je lui parle et que je vienne en aide à mon père. (Haut.) Par Pollux ! je ne crois pas qu'il y ait sur terre un homme aussi passionnément épris de sa femme que celui-ci ; il vous aime à en crever.
JUPITER. Te voilà bien, bourreau ! hors d’ici à l’instant ! De quoi te mêles-tu, coquin ? oses-tu bien souffler ? Ce maître bâton…
ALCMÈNE. Ah ! de grâce !
JUPITER. Que j’entende encore un mot !
MERCURE, à part. Bien réussi pour mon début dans le métier de parasite !
JUPITER. Quant à toi, chère femme, tu as tort de te fâcher contre moi. J’ai quitté l’armée en grand secret ; j’ai dérobé pour toi quelques instants à mon devoir ; je voulais que tu fusses la première à connaître mes succès, et je voulais être le premier à te les apprendre : est-ce donc là montrer si peu d’amour ?
MERCURE, à part. Ne l’avais-je pas bien dit ? comme il amadoue la pauvrette !