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PARDALISQUE. Il avait dit de préparer son dîner.

CLÉOSTRATE. Chut ! tais-toi et va-t’en. Point d’apprêts, point de cuisine aujourd’hui pour un vieux fou qui nous contrarie, son fils et moi, et ne songe qu’à ses lubies amoureuses. Le vilain homme ! je le punirai par la faim, par la soif, par les injures et les mauvais procédés ; oui, je l’accablerai de sanglants reproches ; je le réduirai à vivre comme il le mérite, cet amoureux décrépit, qui pue le vice et respire la débauche ! Je cours de ce pas chez mes voisines, me plaindre de ma disgrâce. Mais la porte crie ; eh ! c’est bien elle, la voilà justement qui sort : j’ai mal pris mon temps.


SCÈNE II. — MYRRHINE, CLÉOSTRATE.

MYRRHINE. Suivez-moi ici près, vous autres. Eh bien ! m’a-t-on entendue ? Si mon mari ou quelque autre personne me demande (montrant la maison de Cléostrate), je serai là. Quand je suis seule à la maison, le sommeil me fait tomber l’ouvrage des mains. N’ai-je pas dit de m’apporter ma quenouille ?

CLÉOSTRATE. Bonjour, Myrrhine.

MYRRHINE. Bonjour, Cléostrate. Eh ! que vous avez l’air triste !

CLÉOSTRATE. Comme toutes celles qui sont malheureuses en ménage. Le chagrin ne manque jamais, ni chez soi, ni dehors. J’allais précisément vous voir.

MYRRHINE. J’allais aussi vous rendre visite. Mais qu’est-ce donc qui vous afflige ? vous savez que je partage toutes vos peines.

CLÉOSTRATE. Je vous crois, car je n’ai pas de voisine qui me soit plus chère que vous (vous le méritez bien), ni en qui j’aie plus de confiance.

MYRRHINE. Vous êtes trop aimable, mais je voudrais bien savoir de quoi il s’agit.

CLÉOSTRATE. Mon mari m’outrage de la manière la plus indigne.

MYRRHINE. Oh, oh ! qu’est-ce donc ? répétez, je vous prie, je n’ai pas bien compris vos plaintes.

CLÉOSTRATE. Mon mari m’outrage de la manière la plus indigne, et je ne puis même pas faire valoir mon droit.

MYRRHINE. C’est bien étonnant, si vous dites vrai ; car ce sont les maris qui ne peuvent venir à bout de faire valoir leur droit auprès des femmes.