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me rendra à mon père. C’est pour cela que j’ai fait partir Tyndare.

ARISTOPHONTE. Tyndare, c’est toi, et.il n’y a pas dans toute l’Élide un autre esclave de ce nom.

TYNDARE. Tu continues de me reprocher la servitude où le sort des armes m’a jeté ?

ARISTOPHONTE. Je ne me possède plus.

TYNDARE, à Hégion. Entendez-vous ? Fuyez au plus vite ! Il va vous poursuivre à coups de pierres, si vous ne le faites saisir.

ARISTOPHONTE. J’enrage.

TYNDARE. Ses yeux jettent la flamme ; il vous faut une bonne corde, Hégion. Voyez-vous sur sa peau toutes ces taches livides ? C’est la bile noire qui le tourmente.

ARISTOPHONTE. Ah ! par Pollux, si le vieillard a un grain de bon sens, la poix noire te tourmentera chez le bourreau et luira sur ta tête.

TYNDARE. Le délire le prend ; les fantômes le poursuivent.

HÉGION. Bons dieux ! si je le faisais arrêter ?

TYNDARE. Ce serait sage.

ARISTOPHONTE. J’enrage de n’avoir pas une pierre pour briser la tête de ce maraud, dont les propos me rendent fou.

TYNDARE. Entendez-vous ? il demande une pierre.

ARISTOPHONTE. Je veux vous parler en particulier, Hégion.

HÉGION. Parle d’où tu es ; je t’entendrai à distance.

TYNDARE. Oui ; car si vous approchez, il vous arrachera le nez à belles dents.

ARISTOPHONTE. Hégion, ne croyez pas que je sois fou, que je l’aie jamais été, nique je sois possédé de la maladie dont il parle. Si vous me craignez, faites-moi lier, j’y consens, pourvu qu’on le lie en même temps que moi.

TYNDARE. Pas du tout ; qu’on le lie, puisque c’est sa fantaisie.

ARISTOPHONTE. Tais-toi maintenant ; et je ferai en sorte, faux Philocrate, qu’on trouve en toi aujourd’hui un vrai Tyndare. Pourquoi ces signes ?

TYNDARE. Moi je te fais des signes ? (A Hégion.) Que ne ferait-il pas si vous étiez un peu plus loin ?

HÉGION. Ah çà, si cependant je m’approchais de ce fou ?

TYNDARE. Belle idée ! il se moquera de vous. Il vous racontera des histoires qui n’ont ni pieds ni tête. S’il avait le costume, ce serait Ajax en chair et en os que vous auriez sous les yeux.