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ARGYRIPPE. Assez, Liban, de grâce.

LIBAN. Je suis inflexible aujourd’hui. Je ferai monter une côte à ma bête à coups d’éperons, puis je l’enverrai au moulin, pour qu’on la crève à force de courir. Halte ! je veux bien mettre pied à terre à cette belle place, quoique la monture ne vaille pas grand’chose.

ARGYRIPPE. Eh bien, maintenant que vous vous en êtes donné à cœur joie à nos dépens, lâchez-vous l’argent ?

LIBAN. Oui, si vous me dressez une statue et un autel, et si vous m’immolez un bœuf, comme à un dieu, car je suis pour vous le dieu Salut.

LÉONIDAS. Eh ! mon maître, envoyez promener ce coquin et adressez-vous à moi. C’est à moi qu’il faut offrir les honneurs et les prières qu’il demande.

ARGYRIPPE. Quel dieu seras-tu ?

LÉONIDAS. La Fortune, et même la Fortune obéissante.

ARGYRIPPE. Allons, tu vaux mieux que celui-ci.

LIBAN. Est-il rien de plus cher à l’homme que le salut ?

ARGYRIPPE. Je salue la Fortune et ne méprise pas pour cela le Salut.

PHILÉNIE. Sur mon âme, chacune des deux divinités a son mérite.

ARGYRIPPE. J’en conviendrai, quand j’aurai tâté de leurs faveurs.

LÉONIDAS. Faites un souhait ;que désirez-vous ?

ARGYRIPPE. Eh bien ! si j’exprime un vœu ?

LÉONIDAS. Il s’accomplira.

ARGYRIPPE. Je souhaite donc de posséder Philénie une année entière.

LÉONIDAS. Accordé.

ARGYRIPPE. Vraiment ?

LÉONIDAS. Rien de plus vrai.

LIBAN. À mon tour, maintenant, mettez-moi à l’épreuve. Dites ce que vous souhaitez le plus ardemment, et cela sera.

ARGYRIPPE. Eh ! que puis-je souhaiter, sinon ce qui me manque ? vingt bonnes mines d’argent pour les donner à sa mère.

LIBAN. Vous les aurez ; soyez tranquille ; vos souhaits se réaliseront.

ARGYRIPPE. Le Salut et la Fortune se jouent de nous, c’est leur habitude.

LÉONIDAS. Quand il s’est agi de trouver cet argent, c’est moi qui ai été la tête.