la première, nous dirons, j’imagine, que jamais rien n’est devenu plus grand ni plus petit, soit en volume, soit en nombre, tant qu’il a été égal à lui-même. N’est-ce pas vrai ?
Si.
En second lieu, qu’une chose à laquelle on n’ajoute ni ne retranche rien, ne croît ni ne décroît jamais, mais reste toujours égale.
Cela est incontestable.
Ne dirons-nous pas aussi, en troisième lieu, que ce qui n’existait pas auparavant n’a pas pu exister par la suite sans devenir et sans être devenu ?
Il me le semble.
Or ces trois propositions sur lesquelles nous sommes d’accord se combattent dans notre esprit, quand nous parlons des osselets, ou quand nous disons que moi, à l’âge où je suis, sans avoir grandi ni subi d’altération contraire, je suis, au cours d’une année, à présent plus grand que toi, qui es jeune, et qu’ensuite je serai plus petit, sans qu’on ait rien ôté à ma taille, mais parce que la tienne aura grandi. Je suis en effet dans la suite ce que je n’étais pas auparavant, bien que je ne le sois pas devenu ; car il est impossible d’être devenu sans devenir, et, n’ayant rien perdu de mon volume, je ne saurais jamais devenir plus petit. Et nous trouverons des milliers de cas semblables, si nous admettons ceux que j’ai mentionnés. Tu me suis, j’espère, Théétète. Je pense du moins que tu n’es pas neuf sur ces matières.
Par les dieux, Socrate, je suis perdu d’étonnement quand je me demande ce que tout cela peut être, et il arrive qu’à le considérer, je me sens véritablement pris de vertige.
Je vois, mon ami, que Théodore n’a pas mal deviné le caractère de ton esprit ; car c’est la vraie marque