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veines, sans garder l’ordre des révolutions naturelles. Elles sont ennemies entre elles, parce qu’elles ne tirent aucune jouissance les unes des autres, et en guerre ouverte avec les éléments constituants du corps qui restent à leur poste ; elles les corrompent et les dissolvent. Quand ce sont les parties les plus anciennes de la chair qui se décomposent, comme elles sont difficiles à pourrir, elles noircissent à cause de la combustion prolongée qu’elles ont subie, et, devenues amères par suite de leur corrosion complète, elles attaquent dangereusement toutes les parties du corps qui ne sont pas encore gâtées, et tantôt le noircissement, au lieu d’amertume, s’accompagne d’acidité, quand la substance amère s’est amenuisée davantage ; et tantôt la substance amère, trempée dans le sang, prend une couleur plus rouge, et, si elle est mêlée au noir, une couleur verdâtre. Enfin la couleur jaune se mêle à l’amertume, quand de la chair jaune est dissoute par le feu de l’inflammation.

Toutes ces humeurs portent le nom commun de bile, qui leur a été donné ou par des médecins ou par un homme capable d’embrasser du regard un grand nombre de cas dissemblables et de discerner en eux un genre unique digne de servir de dénomination à tous.

Des autres humeurs qui passent pour être des variétés de la bile, chacune se définit d’après sa couleur spécifique. La sérosité qui vient du sang est une lymphe douce ; celle qui vient de la bile noire et acide est maligne, quand sous l’action de la chaleur elle est mélangée avec une qualité saline ; en ce cas, elle prend le nom de pituite acide. Il y a aussi le produit qui résulte de la décomposition d’une chair neuve et tendre avec le concours de l’air. Ce produit, gonflé par l’air, est entouré d’humidité et, de ce fait, il se forme des bulles qui sont invisibles une à une à cause de leur petitesse, mais qui, réunies ensemble, font une masse visible qui offre une couleur blanche due à la naissance de l’écume. C’est toute cette putréfaction d’une chair tendre, où l’air se trouve mélangé, que nous appelons la pituite blanche. La lymphe de la pituite nouvellement formée donne la sueur, les larmes et toutes les autres sécrétions par lesquelles le corps se purifie tous les jours. Or toutes ces humeurs sont des facteurs de maladies, quand le sang ne se remplit pas de nourriture et de boisson comme le veut la nature, mais accroît sa masse d’aliments contraires, en dépit des lois de la nature. Lorsque les différentes sortes de chair sont déchirées par les maladies, mais gardent leurs bases, la virulence du mal ne se fait sentir qu’à demi, car il peut encore se réparer aisément. Mais, lorsque ce qui lie les chairs aux os tombe malade, et que, séparé à la fois des fibres et des nerfs, il cesse de nourrir l’os et de lier l’os à la chair, mais que, de brillant, de lisse et de visqueux, il