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L’ÉTRANGER

Je veux dire que jamais un grand nombre d’hommes, quels qu’ils soient, n’acquerront jamais une telle science et ne deviendront capables d’administrer un Etat avec intelligence, et que c’est chez un petit nombre, chez quelques-uns, ou un seul, qu’il faut chercher cette science unique du vrai gouvernement, que les autres. gouvernements doivent être considérés comme des imitations de celui-là, imitations tantôt bien, tantôt mal réussies.

SOCRATE LE JEUNE

Comment entends-tu cela ? Car, même tout à l’heure, j’ai mal compris ce que sont ces imitations.

L’ÉTRANGER

Nous nous exposerions à un reproche sérieux si, après avoir soulevé cette question, nous la laissions tomber, sans la traiter à fond et sans montrer l’erreur qu’on commet aujourd’hui en cette matière.

SOCRATE LE JEUNE

Quelle erreur ?

L’ÉTRANGER

Voici ce que nous avons à chercher. Ce n’est pas du tout ordinaire ni aisé à voir ; essayons pourtant de le saisir. Puisqu’il n’y a pas pour nous d’autre gouvernement parfait que celui que nous avons dit, ne vois-tu pas que les autres ne peuvent subsister qu’en lui empruntant ses lois écrites, en faisant ce qu’on approuve aujourd’hui, bien que ce ne soit pas le plus raisonnable ?

SOCRATE LE JEUNE

Quoi donc ?

L’ÉTRANGER

C’est que personne dans la cité n’ose rien faire contre les lois et que celui qui l’oserait soit puni de mort et des derniers supplices. Et c’est là le principe le plus juste et le plus beau, en seconde ligne, quand on a écarté le premier, que nous avons exposé tout à l’heure. Comment s’est établi ce principe que nous mettons en seconde ligne, c’est ce qu’il nous faut expliquer, n’est-ce pas ?

SOCRATE LE JEUNE

Certainement.

L’ÉTRANGER

XXXVII. — Revenons donc aux images qui s’imposent chaque fois que nous voulons portraire des chefs faits pour la royauté.