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SOCRATE

505d-506c Alors quel autre consent à discuter ? Nous ne pouvons certes pas laisser la discussion inachevée.

CALLICLÈS

Ne pourrais‑tu pas la poursuivre toi-même, soit en parlant tout seul, soit en te répondant à toi-même ?

SOCRATE

Tu veux donc que, suivant le mot d’Épicharme, je suffise à moi seul à dire ce que deux hommes disaient auparavant [1]? J’ai peur d’être forcé d’en venir là. Mais si nous procédons de la sorte, je pense, moi, que nous devons tous rivaliser d’ardeur pour découvrir ce qu’il y a de vrai et ce qu’il y a de faux dans la question que nous traitons ; car nous avons tous à gagner à faire la lumière sur ce point. Je vais donc vous exposer ce que j’en pense, et, si quelqu’un de vous trouve que je me fais des concessions erronées, qu’il me reprenne et me réfute. Aussi bien je ne parle pas comme un homme sûr de ce qu’il dit, mais je cherche de concert avec vous, en sorte que, si mon contradicteur me paraît avoir raison, je serai le premier à le reconnaître. Si je vous dis cela, c’est pour le cas où vous jugeriez qu’il faut pousser la discussion jusqu’au bout ; mais si vous ne le voulez pas, restons‑en là et allons‑nous‑en.

GORGIAS

Pour ma part, Socrate, je suis d’avis qu’il ne faut pas encore nous retirer, mais que tu ailles jusqu’au bout de ton exposition, et je suis sûr que les autres partagent mon opinion. Personnellement, je désire t’entendre développer ce qui te reste à dire.

SOCRATE

De mon côté, Gorgias, j’aurais volontiers continué à discuter avec Calliclès, jusqu’à ce que je lui eusse rendu la réplique d’Amphion en échange de la tirade de Zéthos. Mais puisque tu refuses, Calliclès, de m’aider à terminer l’entretien, écoute‑moi du moins et arrête‑moi, si tu trouves que j’avance quelque chose d’inexact. Et si tu me démontres mon erreur, je ne me fâcherai pas contre toi, comme tu viens de le faire à mon égard ; au contraire, je t’inscrirai au premier rang de mes bienfaiteurs.

CALLICLÈS

Parle toi-même, mon bon, et achève.

SOCRATE

LXII. — Écoute‑moi donc, tandis que je reprends 506c-507c l’argumentation

  1. Allusion à un vers d'une comédie d'Épicharme qu'Athénée (VII, ch. 16) nous a conservé : quand celui qu'on interroge refuse de répondre, on est obligé de faire soi-même la demande et la réponse.