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tout le monde conviendra, je pense, qu’ils ne périssent jamais.

— Oui, par Zeus, tout le monde, dit-il, et les dieux tous les premiers.

— Or, puisque l’immortel est aussi impérissable, est-ce que l’âme, si elle est immortelle, n’est pas aussi impérissable ?

— Elle l’est de toute nécessité.

— En conséquence, lorsque la mort approche de l’homme, ce qu’il y a de mortel en lui meurt, à ce qu’il paraît, mais ce qu’il y a d’immortel se retire sain et sauf et incorruptible et cède la place à la mort.

— C’est évident.

— Il est donc absolument certain, Cébès, reprit Socrate, que l’âme est immortelle et impérissable, et nos âmes existeront réellement dans l’Hadès.

— Pour ma part, Socrate, dit Simmias, je n’ai rien à dire là contre et aucun motif de me défier de tes arguments. Mais si Simmias ou quelque autre a quelque chose à dire, ils feront bien de ne pas se taire, car je ne vois pas quelle autre occasion que celle-ci ils pourraient attendre, s’ils veulent, ou parler, ou entendre parler sur ces matières.

— Moi non plus, dit Simmias, je n’ai plus de raison de me défier, après ce qui vient d’être dit. Cependant la grandeur du sujet en question et la piètre opinion que j’ai de la faiblesse humaine font que je ne puis m’empêcher de garder encore par devers moi quelque défiance à l’égard de la thèse exposée par Socrate.

— Non seulement ce que tu dis là, Simmias, repartit Socrate, est fort bien dit, mais quelque sûres que soient nos premières hypothèses, il n’en faut pas moins les soumettre à un examen plus approfondi, et quand vous les aurez bien analysées, vous suivrez, je pense, le raisonnement, autant qu’il est possible à l’homme de le faire, et quand vous serez sûrs de le suivre, vous n’aurez pas à chercher au-delà.

— C’est vrai, dit-il.

LVII. — Mais voici une chose, mes amis, poursuivit Socrate, qu’il est juste de se mettre dans l’esprit, c’est que, si l’âme est immortelle, il faut en prendre soin, non seulement pour le temps que dure ce que nous appelons vivre, mais pour tout le temps à venir, et il semble à présent qu’on s’expose à un terrible danger, si on la néglige. Si en effet la mort nous délivrait de tout, quelle