Page:Platon - Apologie de Socrate ; Criton ; Phédon (trad. Chambry), 1992.djvu/164

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Alors, reprit Socrate, nous sommes absolument d’accord sur ce point, que jamais un contraire ne sera contraire à lui-même ?

— Absolument, dit-il.

LII. — Examine-moi encore ceci, poursuivit Socrate, et vois si tu seras de mon avis. Y a-t-il quelque chose que tu appelles chaud et quelque chose que tu appelles froid ?

— Oui.

— Sont-ce les mêmes choses que la neige et le feu ?

— Non, par Zeus.

— Alors le chaud est autre chose que le feu, et le froid autre chose que la neige ?

— Oui.

— Alors tu es bien, je pense, de cet avis, que jamais la neige, étant neige, si elle a, pour reprendre notre expression de tout à l’heure, reçu le chaud, ne sera plus ce qu’elle était, à la fois neige et chaude, mais, à l’approche du chaud, ou bien elle lui cédera la place, ou bien elle périra.

— Certainement.

— Et de même le feu, si le froid s’approche de lui, ou se retirera ou bien périra ; mais jamais il ne se résoudra, ayant reçu le froid, à être encore ce qu’il était, à la fois feu et froid.

— C’est vrai, dit-il.

— Il arrive donc, reprit Socrate, que dans quelques cas du même genre, non seulement l’idée abstraite elle-même ait droit à porter le même nom éternellement, mais qu’il en soit de même pour une autre chose qui n’est pas cette idée, mais qui a toujours, tant qu’elle existe, la forme de cette idée. Voici des exemples qui rendront peut-être ma pensée plus claire. Il faut que l’impair garde toujours ce nom qui sert à le désigner à présent, n’est-ce pas ?

— Certainement.

— Or est-il la seule chose qui ait ce nom ? car c’est cela que je demande ; ou y en a-t-il quelque autre qui, sans être ce qu’est l’impair, doit cependant toujours porter elle-même le nom d’impair en plus de son propre nom, parce que sa nature est telle qu’elle n’est jamais séparée de l’impair ? C’est le cas, dis-je, pour le nombre trois et pour beaucoup d’autres choses. Arrêtons-nous au nombre trois. Ne te semble-t-il pas qu’il