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SECOND ALCIBIADE

[ou Sur la prière, maieutique.]


SOCRATE. ALCIBIADE

Introduction.
La prière
imprudente
d’Œdipe.

138Socrate. — Eh bien, Alcibiade, tu vas prier le dieu ?

Alcibiade. — Mais certainement, Socrate.

Socrate. — Tu as l’air bien sombre et tu regardes à terre comme si quelque chose te préoccupait.

Alcibiade. — Et de quoi serait-on préoccupé, Socrate ?

Socrate. — De la plus sérieuse des préoccupations, Alcibiade, à mon avis, du moins. bCar, dis-moi par Zeus, ne crois-tu pas que les dieux parfois nous accordent ce que nous leur demandons dans nos prières soit privées, soit publiques, parfois aussi nous le refusent ; que certains sont exaucés et d’autres ne le sont pas ?

Alcibiade. — Absolument.

Socrate. — Ne te semble-t-il pas dès lors que beaucoup de prudence est nécessaire pour ne pas demander à son insu de grands maux, en les prenant pour des biens, et que de leur côté, les dieux sont dans la disposition d’accorder à chacun ce qu’il demande ? Ainsi, par exemple, Œdipe, comme on le rapporte, pria les dieux de laisser ses fils trancher par l’épée la question de l’héritage paternel[1]. cAlors qu’il

  1. Les malédictions d’Œdipe sont rapportées dans le poème de la Thébaïde dont on ignore l’auteur. Il reste seulement quelques vers (cf. Cycli reliquiae, Didot, p. 587). — Eschyle, dans les Sept contre Thèbes rappelle ces imprécations et, comme l’auteur du dialogue, les attribue à la démence du prince (v. 726 et suiv.). — L’attitude