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NOTICE GÉNÉRALE

à croire que d’autres écoles philosophiques gardaient également et lisaient des lettres de leurs scolarques.

Plus anciennement, Isocrate avait rédigé un certain nombre de lettres dont plusieurs sont de véritables petits traités moraux et politiques. Évidemment, les pièces de ce recueil ne sont pas toutes des lettres privées, quelques-unes nous révèlent l’existence d’un genre déjà bien défini et assez répandu au ive siècle avant Jésus-Christ. Ce sont plutôt des « lettres ouvertes », destinées en partie au personnage expressément désigné, mais surtout au grand public. Ces missives ne doivent pas rester secrètes ; elles sont écrites pour être publiées. Il suffit, pour s’en convaincre, de remarquer la coquetterie que met l’auteur à limer sa pensée et à pomponner son style, le souci qu’il a de ne point enfreindre les règles de son art. Qu’on lise, par exemple, la lettre à Philippe (lettre II) : « J’aurais encore bien des choses à dire, vu la nature de mon sujet, mais je m’arrête. Je pense, en effet, que vous pourrez facilement, toi et tes amis les plus distingués, ajouter à mes paroles tout ce qui vous plaira. D’ailleurs, je crains d’abuser, car déjà, peu à peu, sans m’en apercevoir, j’ai dépassé les limites d’une lettre et atteint les proportions d’un discours[1]. » Nous pouvons citer encore la lettre aux enfants de Jason (lettre VI) et la 3e lettre adressée à Philippe, que beaucoup de critiques regardent comme authentiques[2]. «… N’allez pas croire que cette lettre ait un autre but que de répondre à votre amitié et que je veuille faire parade d’éloquence (ἐπίδειξιν). Je n’en suis point venu à ce degré de folie de ne pas me rendre compte que je serais incapable désormais d’écrire des choses meilleures que celles

  1. Hercher, Epistolographi graeci, p. 323, 13.
  2. Tandis que Münscher (Pauly-Wissowa IX, 2) regarde comme apocryphes les lettres VI, IX, IV, III, Drerup (Isocratis Opera, I, 1906, p. clix et suiv.), après Blass, les reconnaît toutes comme authentiques. Telle est aussi l’opinion de Croiset, qui rejette pourtant la 9e (Hist. de la Littér. gr., IV, p. 485). Dans sa récente thèse Philippe et lettres à Philippe, à Alexandre et à Antipatros, texte et traduction avec une introduction et des notes, Paris, Boccard, 1924, G. Mathieu admet l’authenticité de toutes ces lettres.