Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome XIII, 1.djvu/226

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
349 d
62
LETTRE VII

et se répandit en plaintes contre Denys. Ce dernier apprit que j’étais allé chez Théodote. Ce lui fut un autre excellent prétexte de désaccord avec moi, tout semblable au premier. e Il me fit demander si vraiment je m’étais rendu chez Théodote sur l’invitation de celui-ci. — « Assurément », répondis-je. — « Dès lors, reprit l’envoyé, il m’ordonne de te dire que tu agis très mal en faisant plus de cas de Dion et de ses amis que de lui-même. » Après cette communication, jamais plus il ne me rappela dans son palais, comme s’il était d’ores et déjà évident que j’étais lié d’amitié avec Théodote et Héraclide et que j’étais son ennemi. De plus, il supposait que je ne pouvais être animé d’aucun sentiment de bienveillance envers un homme qui avait complètement dilapidé les biens de Dion. J’habitais donc désormais hors de l’acropole, 350 parmi les mercenaires. Je reçus alors plusieurs visites, entre autres celle de quelques serviteurs Athéniens, mes compatriotes. Ils m’apprirent que des calomnies couraient sur mon compte parmi les peltastes et que certains avaient proféré contre moi des menaces de mort, s’ils parvenaient à me saisir[1]. J’imaginai donc pour me sauver le moyen suivant : je fais avertir Archytas et mes autres amis de Tarente de la situation où je me trouve. Ceux-ci, sous le couvert d’une ambassade partant de leur cité, envoient b un navire à trente rames avec l’un d’entre eux, Lamisque, qui, dès, son arrivée, va intercéder pour moi auprès de Denys, lui dit que je désire partir et de ne pas s’y opposer. Denys donna son consentement et me congédia en me payant les frais de route. Quant aux biens de Dion, je n’en réclamais quoi que ce fût et on ne m’en donna rien.


Platon à Olympie. La guerre civile.

Arrivé dans le Péloponèse, à Olympie, je rencontrai Dion qui assistait aux jeux et je lui racontai tout ce qui s’était passé. Lui, prenant Zeus à témoin, nous exhorta aussitôt, moi, mes

  1. Selon Plutarque (Dion, c. 19) les mercenaires reprochaient à Dion son influence sur Denys. Ils l’accusaient de pousser le tyran à renoncer à son pouvoir autocratique et, par conséquent, à les licencier, eux, qui étaient les soutiens de la tyrannie. L’historien ne fait aucune allusion à la révolte des mercenaires. Du reste, il utilise des sources différentes de la lettre et a soin de mentionner cette divergence (l. c.).