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LA RÉPUBLIQUE IV

Les mœurs
d’un État viennent
des mœurs
des individus.

Ne te rebute donc pas, dit-il ; poursuis ta recherche.

e

Ne sommes-nous pas, repris-je, absolument forcés de convenir que chacun de nous porte en lui les mêmes espèces de caractères et les mêmes mœurs que l’État ? car elles n’y peuvent venir que de nous. Il serait en effet ridicule de prétendre que le caractère emporté qu’on voit dans les États réputés pour leur violence, comme ceux des Thraces, des Scythes et en général des peuples du Nord, ou la passion de la science, 436qu’on peut dire propre à notre pays, ou l’avidité du gain, qu’on peut regarder comme la marque particulière des Phéniciens et des habitants de l’Égypte, n’aient point passé de l’individu dans l’État.

Assurément, dit-il.

C’est une conclusion qui s’impose, dis-je : il n’est pas difficile de le reconnaître.

Non, certes.


Il y a dans l’âme
de l’individu
trois principes
distincts : la raison,
la colère, la concupiscence.

XII  Mais ce qui est difficile, c’est de décider si tous nos actes sont produits par le même principe, ou s’il y a trois principes chargés chacun de leur fonction respective, c’est-à-dire si l’un de ces principes qui sont en nous fait que nous apprenons, un autre que nous nous mettons en colère, un troisième bque nous recherchons le plaisir de manger, d’engendrer et les autres jouissances du même genre, ou si c’est par l’âme entière que nous produisons chacun des actes où nous nous portons. Voilà ce qu’il sera malaisé de déterminer d’une manière satisfaisante.

C’est aussi mon avis, dit-il.

Essayons de déterminer par cette voie si ces principes se ramènent à un seul ou s’ils sont distincts.

Par quelle voie ?

Il est évident que le même sujet ne peut pas en même temps faire et souffrir des choses contraires dans la même partie de lui-même et relativement au même objet ; de sorte que, si nous découvrons ici des effets contraires, nous saurons qu’ils ne relèvent pas d’un principe unique, cmais de plusieurs.