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LA RÉPUBLIQUE VII

et travaillés d’une main géniale. En les voyant, un géomètre y reconnaîtrait des chefs-d’œuvre d’exécution, mais il trouverait ridicule de les étudier sérieusement dans le dessein d’y saisir la vérité absolue des rapports d’égalité, du double ou 530de toute autre proportion.

Sans nul doute, fit-il, ce serait ridicule.

Et le véritable astronome, continuai-je, ne crois-tu pas qu’il se placera au même point de vue en regardant les mouvements célestes, et qu’il pensera que l’ouvrier du ciel et des astres que le ciel renferme les a disposés avec toute la beauté qu’on peut mettre en de tels ouvrages ; mais quant aux rapports du jour à la nuit, du jour et de la nuit aux mois, des mois à l’année, et des autres astres au soleil, à la lune et à eux-mêmes, bne trouvera-t-il pas absurde, à ton avis, de croire qu’ils sont toujours pareils et ne subissent aucune variation, bien qu’ils soient matériels et visibles, et de chercher par tous les moyens à y saisir la réalité véritable ?

En tout cas, c’est mon avis, dit-il, maintenant que je viens de t’entendre.

C’est donc, repris-je, en nous posant des problèmes[1] que nous étudierons l’astronomie, comme la géométrie ; mais nous ne nous arrêterons pas cà ce qui se passe dans le ciel, si nous voulons tirer réellement de cette étude de quoi rendre utile la partie naturellement intelligente de notre âme, d’inutile qu’elle était auparavant.

C’est, dit-il, une tâche bien compliquée que tu imposes aux astronomes, au regard de ce qu’ils font à présent.

Je crois, repris-je, que nous prescrirons la même méthode pour les autres sciences, si nous sommes des législateurs sérieux.

    des mouvements astronomiques visibles. Ces mouvements composants méritent seuls d’être appelés réels et vrais. »

  1. « Voici quel problème Platon proposait aux chercheurs en ce domaine (l’astronomie) : trouver quels mouvements circulaires et parfaitement réguliers il faut supposer pour sauver les apparences présentées par les astres errants. » Simplicius in Arist. de Cœlo, Heiberg, p. 488 et 493. Cf. Duhem, Le Problème astronomique au temps de Platon, p. 102 et suiv. Mais Platon n’en dit pas moins ici même que les mouvements du ciel visible ne se plieront jamais à une interprétation mathématique exhaustive : les anomalies dans les