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LA RÉPUBLIQUE VI

dit, et qu’ils règnent, l’un sur le genre et le monde intelligibles, l’autre sur le monde visible, je ne dis pas le ciel : tu pourrais croire que je veux étaler ma science étymologique à propos de ce mot[1]. Tu saisis bien ces deux espèces, le visible, l’intelligible ?

Oui.


Les quatre objets
de connaissance
et les quatre
opérations
de l’esprit.

Suppose à présent une ligne coupée en deux parties inégales[2] ; coupe encore chaque partie suivant la même proportion, celle du genre visible et celle de l’intelligible ; et suivant le degré de clarté ou d’obscurité erelatives des choses, tu auras dans le monde visible, 510une première section, celle des images. J’appelle images en premier lieu les ombres, ensuite les fantômes représentés dans les eaux et sur la surface des corps opaques, lisses et brillants, et toutes les autres représentations du même genre. Tu saisis ?

Oui, je saisis.

Représente-toi maintenant l’autre section dont la première est l’image : elle nous comprend, nous les êtres vivants, et avec nous toutes les plantes et tous les objets fabriqués par l’homme.

Je me la représente, dit-il.

Veux-tu bien admettre aussi, repris-je, que le genre visible se divise en vrai et en faux, et que l’image est au modèle comme l’objet de l’opinion est à l’objet de la connaissance ?

bOui, dit il, certainement.

D’un autre côté considère de quelle manière il faut couper la section de l’intelligible.

Comment ?

Voici : dans la première partie de cette section, l’âme, se servant comme d’images, des objets qui dans la section précédente étaient des originaux, est forcée d’instituer ses recherches en partant d’hypothèses et suit une marche qui la mène, non au principe, mais à la conclusion ; dans la deuxième partie l’âme va de l’hypothèse au principe absolu, sans faire usage

  1. Le Soleil pourrait être appelé βασιλεὺς οὐρανοῦ aussi bien que β. ὁρατοῦ. Mais Socrate évite le mot οὐρανοῦ pour qu’on ne l’accuse pas de faire dériver οὐρανοῦ de ὁρᾶν, comme on le faisait de son temps (Cratyle 36 A).
  2. Faut-il lire ici ἄνισα (inégales) ou ἴσα ou ἀν’ ἴσα (égales) ? La