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LA RÉPUBLIQUE VI

Oui, repris-je, il y a quelque chose au-dessus, et j’ajoute qu’à l’égard de ces vertus mêmes il ne faut pas nous borner comme nous l’avons fait jusqu’ici à en regarder l’esquisse ; il ne faut pas renoncer à en contempler le tableau achevé. Ne serait-ce pas ridicule d’appliquer tous ses efforts à des choses de peu de conséquence, epour qu’elles aient toute l’exactitude et la netteté possibles, et de ne pas comprendre que les choses les plus importantes ont besoin aussi de la plus grande exactitude ?

Si, dit-il, [ton idée est bonne][1] ; mais crois-tu, ajouta-t-il, qu’on te laissera passer outre sans te demander ce qu’est cette étude si importante et quel en est l’objet, selon toi ?

Pas du tout, répondis-je ; mais tu n’as qu’à m’interroger ; au reste tu m’as entendu traiter la question plus d’une fois, et maintenant ou tu l’as oublié ou tu ne cherches qu’à m’embarrasser par tes objections.505C’est plutôt cette dernière supposition qui est la vraie, ce me semble, puisque tu m’as souvent entendu dire que l’idée du bien Il faut les conduire
jusqu’à l’idée
du bien.
est l’objet de la science la plus haute, et que c’est d’elle que la justice et les autres vertus tirent leur utilité et leurs avantages. C’est encore, tu t’en doutes bien, ce que je vais te répondre à présent, en ajoutant que nous ne connaissons pas exactement cette idée, et que, si nous ne la connaissons pas, connussions-nous tout ce qui est en dehors d’elle aussi parfaitement qu’il est possible, cela, tu le sais, ne nous servira de rien, de même que bsans la possession du bien celle de toute autre chose nous est inutile. Crois-tu en effet qu’il y ait quelque avantage à posséder quelque chose que ce soit, si elle n’est bonne, ou à connaître tout, sans connaître le bien, et à ne rien connaître de beau ni de bon ?

Non, par Zeus, dit-il.


XVII  D’autre part tu sais aussi que le vulgaire fait consister le bien dans le plaisir, et les raffinés dans l’intelligence.

Sans doute.

Tu sais aussi, cher ami, que ceux qui partagent ce dernier

  1. L’expression « ton idée est bonne (ἄξιον τὸ διανόημα) » ne