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LA RÉPUBLIQUE IV

Que dis-tu là ? s’écria-t-il.

Tout d’abord, dis-je, s’il faut en venir aux mains, n’est-ce pas des hommes riches que nos gens, athlètes voués à la guerre, auront à combattre ?

J’en conviens, dit-il.

Mais quoi ! Adimante, repris-je ; un seul boxeur parfaitement entraîné à la lutte n’est-il pas pour toi de taille à tenir tête à deux adversaires ignorants de la boxe, et de plus riches et chargés de graisse ?

Non sans doute, répondit-il, du moins à tous les deux à la fois.

Pas même, repris-je, s’il pouvait se dérober par la fuite pour se retourner ensuite cet frapper chaque fois celui qui le suivrait de plus près, et s’il renouvelait cette manœuvre plusieurs fois sous la chaleur suffocante du soleil ? Un tel homme ne pourrait-il pas dompter même plus de deux adversaires comme ceux-là ?

Assurément, dit-il, ce ne serait pas merveille.

Et crois-tu que les riches ne soient pas plus habiles et plus exercés à la lutte qu’à la guerre ?

Je n’en doute pas, dit-il.

Il est donc vraisemblable que nos athlètes tiendront facilement tête à des adversaires deux ou trois fois plus nombreux qu’eux.

Je te l’accorde, dit-il ; car il me semble que tu as raison.

dEt si, envoyant une ambassade dans un des deux États, ils disaient, ce qui d’ailleurs serait la vérité : « Nous ne faisons aucun usage de l’or ni de l’argent : cela nous est défendu ; à vous, non ; mettez-vous donc de notre côté, et les biens de l’adversaire sont à vous, » crois-tu que ceux qui s’entendraient faire de telles offres choisiraient de faire la guerre à des chiens durs et maigres plutôt que de se joindre aux chiens contre des moutons gras et tendres ?

Je ne le crois pas ; mais, poursuivit-il, si un seul État accumule chez lui les richesses des autres, eprends garde qu’elles ne le rendent redoutable à l’État pauvre.

Tu es bien bon, dis-je, de penser que le nom d’État puisse être appliqué à tout autre qu’à celui que nous avons organisé.

    le sol de la terre pour y récolter le fruit de Déo, s’il vous est permis de vivre oisifs et de négliger toutes ces occupations ? »