La pensée de cet homme qui connaît mérite donc selon nous le nom de connaissance ; celle de l’autre, qui juge sur l’apparence, le nom d’opinion.
Assurément.
Mais si cet homme[1] dont nous disons qu’il n’a que l’opinion, et non la connaissance, se fâchait contre nous et nous contestait notre assertion, en’aurions-nous pas de quoi le calmer et le persuader doucement, sans lui laisser voir qu’il a l’esprit malade ?
C’est notre devoir de le faire, dit-il.
Eh bien, allons, cherche ce que nous pouvons répondre, ou bien veux-tu que nous lui posions des questions, l’assurant que, s’il sait quelque chose, nous n’en sommes pas jaloux, mais que nous serions heureux de trouver un homme qui sait quelque chose ? Réponds-nous, lui demanderai-je : celui qui connaît, connaît-il quelque chose ou rien ? Réponds à sa place, toi.
Je répondrai, dit-il, qu’il connaît quelque chose.
Qui est ou qui n’est pas ?
477Qui est ; car le moyen de connaître quelque chose qui n’est pas ?
Ainsi nous tenons pour certain, à quelque point de vue que nous nous placions, que ce qui est absolument est connaissable absolument, et que ce qui n’existe en aucune façon, n’est connaissable en aucune façon ?
C’est très certain.
Voilà qui est bien. Mais s’il y a des choses ainsi faites qu’elles sont à la fois et ne sont pas, ne tiendront-elles pas le milieu entre l’être pur et le non être absolu ?
Elles le tiendront.
bSi donc la connaissance se rapporte à l’être, et si l’ignorance doit être rapportée au non être, il faut chercher pour ce milieu un milieu entre l’ignorance et la science, supposé qu’il existe quelque chose de semblable.
Assurément.
Est-ce quelque chose que l’opinion ?
Sans doute.
- ↑ Il se peut que Platon vise Antisthène, adversaire déclaré de la théorie des Idées. On connaît la passe d’armes qui eut lieu entre eux : « Je vois bien le cheval réel, Platon, mais je ne vois pas de