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LA RÉPUBLIQUE V

De beaucoup.

Et leurs femmes, comparées aux autres femmes, ne seront-elles pas aussi les meilleures ?

De beaucoup, elles aussi, répondit-il.

Mais y a-t-il rien de plus avantageux pour un État que d’avoir des femmes et des hommes aussi excellents que possible ?

Non, rien.

Mais cette excellence, n’est-ce pas par la musique et la gymnastique, 457pratiquées selon nos prescriptions, qu’ils y parviendront ?

Sans nul doute.

Alors notre institution n’est pas seulement possible ; elle est encore la plus avantageuse pour l’État.

C’est vrai.

Ainsi donc les femmes des gardiens devront se mettre nues, puisque la vertu leur tiendra lieu d’habits, et partager avec eux la guerre[1] et tous les travaux qui se rapportent à la garde de l’État, sans s’occuper d’autre chose ; seulement de ces travaux on leur confiera les plus faciles, plutôt qu’aux hommes, en raison de la faiblesse de leur sexe. Quant à l’homme qui plaisante bà la vue de femmes nues qui s’exercent en vue de la perfection, « il cueille le fruit du rire avant qu’il soit mûr[2] » et il ignore absolument, semble-t-il, pourquoi il rit et ce qu’il fait ; car on a et on aura toujours grande raison de dire que l’utile est beau, et le nuisible, laid.

Assurément.


VII  Voilà, si je puis dire, la première vague traversée, j’entends la disposition de la loi sur les femmes, que nous venons de discuter. Non seulement nous n’avons pas été submergés en établissant cque tous les emplois doivent être communs entre nos gardiens et nos gardiennes, mais la dis-

  1. D’après Hérodote IV, 116 « les femmes des Sauromates vont à la chasse, à cheval, avec leurs maris ou sans eux, elles vont aussi à la guerre et portent le même costume que leurs maris. »
  2. Pindare Fr. 209 (Bergk) ἀτελῆ σοφίας δρέπων καρπόν. Pindare raillait ainsi les φυσιολογοῦντας et leur science. Platon adapte les paroles de Pindare à son dessein de railler les poètes comiques, et substitue τοῦ γελοίου (le rire) à σοφίας (la science).