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INTRODUCTION

ne manqua pas de rendre la pareille à Xénophon, puisque, parlant quelque part de Cyrus, il dit que ce prince, si brave qu’il pût être, avait manqué totalement d’éducation (cf. Lois 694 c). Il ne peut être question de mettre en doute ni la bonne foi ni l’intelligente lecture d’Aulu-Gelle : les bons auteurs dont il parle utilisaient certainement une tradition plus ou moins vieille sur cette opposition de la Cyropédie à la République, tradition qui pouvait être faite elle-même de conjectures et de combinaisons sans manquer pour cela de certains points d’attache dans les textes ou les faits. Nous la retrouvons abrégée, encore que plus complète et plus correcte sur un point, dans Diogène Laërce[1], mais Diogène rappelle simplement l’opposition de la Cyropédie à la République, sans parler pour celle-ci d’une publication échelonnée. Athénée, à propos de Cyrus, parle seulement de la contradiction visiblement voulue entre les Lois et la Cyropédie, et ne dit rien de la République ; mais, de même qu’Aulu-Gelle, il présente bien toute cette rivalité entre Platon et Xénophon comme conjecturée et construite, encore que d’après des indices pour lui très valables[2]. En ce qui concerne l’opposition de Platon à la Cyropédie, l’indice est un texte indéniable des Lois. Quant à l’opposition de la Cyropédie à la République, pouvons-nous penser qu’elle fut conclue, non seulement des différences de doctrine constatées, mais aussi du fait par ailleurs avéré d’une publication au moins partielle de la République précédant notablement celle de la Cyropédie ?

Ce que nous savons de la chronologie des œuvres de Xénophon ne nous aide guère, car nous savons peu, et, sur la date

    uoluntatis indicium crediderunt, quod Xenophon inclyto illi operi Platonis, quod de optimo statu reipublicae ciuitatisque administrandae scriptum est, lectis ex eo duobus fere libris qui primi in uulgus exierant, opposuit contra conscripsitque diuersum regiae administrationis genus, quod Παιδείας Κύρου inscriptum est ».

  1. Diog., III, 34 : « …ils ne font aucune mention l’un de l’autre, sauf toutefois que Xénophon parle de Platon dans le troisième Livre de ses Mémorables ».
  2. Comparer Aulu-Gelle : « et eius rei argumenta quaedam coniectatorie ex eorum scriptis protulerunt » ; et Athénée (XI, 504/5) « οὐ μόνον ἐξ ὧν εἰρήκασι τεκμαιρομένοις ἡμῖν, ἀλλὰ κἀκ τῶν αὐτῶν ὑποθέσεων » et « ὥσπερ ἐναντιούμενος ἐν τρίτῳ Νόμων ».