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INTRODUCTION

République est sortie plus manifeste. Le petit livre d’Hirmer, dense et minutieux, les Essais de Campbell, le commentaire d’Adam, sans parler d’autres travaux, l’ont établie comme une base désormais indiscutable, et d’où partent ceux-là mêmes qui voient dans cette unité, non pas le fait d’une continuité de pensée, mais le résultat d’une refonte savante. Il y a pour eux deux Républiques : l’une publiée vers 390, l’autre vers 370, et leur ingéniosité se complaît à retrouver le plan et le contenu de la première, le prompt « élargissement d’horizon » dans lequel elle apparut trop étroite et dut être remplacée par une autre plus compréhensive, les chances éphémères qu’elle eut de revoir le jour avant de sombrer définitivement dans l’oubli. Voyons rapidement les raisons dont ils appuient leurs conjectures.


L’hypothèse
d’une
première édition.
Ses raisons.

Elles se reproduisent semblables à peu de chose près dans deux travaux séparés par un certain nombre d’années : le chapitre ix de Pohlenz dans son livre Aus Platos Werdezeit (1913), l’article bref et plein de Post dans le Classical Weekly (XXI, 6, 1927, p. 41/4). Ce sont sinon l’indépendance totale du Livre I, au moins (Pohlenz, 209, n. 1) les discordances qui le séparent des autres livres, — la tradition rapportée par Aulu-Gelle sur les duo fere libri publiés les premiers, et qui suscitèrent par opposition la Cyropédie de Xénophon, — la citation de la République (478 d) dans la Lettre VII, (826 a), — la récapitulation du contenu de la République au début du Timée, — les multiples allusions à la République dans le Busiris, qui lui est antérieur, — le parallélisme frappant qui existe entre le Livre V de la République et l’Assemblée des Femmes d’Aristophane, qui date au plus tard de 390. L’ensemble est imposant, et chaque partie en est présentée dans son meilleur jour. On accorde, naturellement, que la première édition de la République est une hypothèse ; mais quelles autres garanties peut-on demander à une hypothèse que d’expliquer au mieux les faits qui s’imposent ? Or, elle seule explique les faits dans leur détail et leur ensemble. On est donc libre de nous offrir le plan de cette pré-République : Livre I à peu près comme nous l’avons ; de II-IV, seulement l’essentiel, une déclaration de Socrate sur sa conception propre de la