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NOTICE

récemment des défenseurs dans W. Janell[1] et H. Raeder[2]. Enfin Wilamowitz, après l’avoir longtemps niée[3], l’admet dans l’étude qu’il a consacrée à l’Ion[4] et où il examine les divers problèmes posés par le dialogue. Il reconnaît qu’elle est aujourd’hui généralement acceptée. Mais aux réserves dont il enveloppe son adhésion on peut encore mesurer l’impression profonde qu’avaient faite sur lui les critiques de Schleiermacher.

En essayant de dégager le sens de l’Ion, nous avons indiqué par avance quelques-unes des difficultés auxquelles se heurte l’interprétation du dialogue, et comment elles nous paraissent se résoudre. Écartons les objections tirées de la langue et du style : celles de Schleiermacher, d’ailleurs peu nombreuses, portent à faux[5] ou se réduisent à des appréciations arbitraires[6] ; et l’on peut en dire autant de celles de C. Ritter[7]. Que le fond du dialogue soit platonicien, c’est ce que reconnaissent Schleiermacher et Zeller, et ce qui ressort des rapprochements indiqués plus haut. Les critiques qui touchent au plan et à la conduite du dialogue, les reproches d’obscurité, d’incohérence, ou de faiblesse dialectique faits à l’auteur sont plus sérieux. Mais, même justifiés, que prouveraient-ils en soi contre l’authenticité[8] ? Tout ce qu’on en pourrait conclure, c’est que Platon n’a pas fait montre ici de la même sûreté ni du même art qu’ailleurs, fait explicable si l’Ion est une œuvre de début[9]. Sur tous ces points, d’ailleurs, il y aurait bien des réserves à faire. Qu’un interlocuteur tel qu’Ion soit traité par Socrate avec une liberté assez cavalière,

  1. Quaestiones platonicae, p. 324 sq.
  2. O. l., p. 90 sq.
  3. Aristoteles und Athen, 1893, p. 188, note 4 ; Hermes, 1909, p. 458 sq.
  4. Platon, zweiter Band, zw. Auflage, 1920, p. 32 sq.
  5. Ainsi quand il déclare, p. 311, que l’emploi transitif de ὁρμῶ (534 c) est insolite en prose : on en trouve d’autres exemples chez Platon lui-même, dans le Phèdre, la République et les Lois.
  6. Par ex., lorsqu’il écrit (même endroit) que λέγουσι (534 c) ne convient pas pour des poètes lyriques.
  7. W. Janell, o. l., p. 336.
  8. Certains ont reproché au Phèdre — dont l’authenticité est hors de doute — une composition peu rigoureuse.
  9. Wilamowitz, o. l., p. 43 sq. Voir infra.