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EUTHYDÈME

la vertu : ils se flattent de l’enseigner mieux et plus rapidement que personne.

C’est sous ce double aspect de maîtres d’éristique et de professeurs de vertu qu’ils apparaissent dans l’Euthydème. À vrai dire, il est impossible d’entrevoir l’idée qu’ils se font de la vertu et leur manière de l’enseigner ; leur méthode se borne à réfuter l’interlocuteur, quelle que soit sa réponse. Vainement Socrate leur propose un thème à développer, et tente de les y ramener ; chaque fois, tout en acceptant, ils s’échappent, pour se retrancher dans un système de discussion dont les résultats ne peuvent être que négatifs.


Récapitulation et nature des sophismes.

Les sophismes qu’ils soutiennent sont au nombre de vingt-deux[1] : deux dans leur entretien avec Clinias ; six dans la première discussion avec Socrate et Ctésippe ; quatorze dans le débat final. Bonitz[2] croit y découvrir un plan déterminé : il y distingue quatre groupes pour la forme et deux pour le fond. Horn paraît voir plus juste en les rangeant en trois catégories, qui correspondent aux trois entretiens où ils apparaissent.

Les deux sophismes du premier entretien portent sur la même question ; une étroite parenté rattache entre eux ceux du second ; aucun ordre ne se découvre dans ceux du troisième : ils se réduisent à des arguties de plus en plus misérables, pour aboutir à la risible question de Dionysodore, qui en marque la fin et le couronnement. C’est par elle qu’on peut commencer l’énumération, car le sophisme s’y présente sous la forme la plus grossière : confusion du sujet et de l’attribut (303 a), dans une phrase où il n’y a en fait ni l’un ni l’autre. On mettra dans le même groupe les sophismes qui précèdent. Quatre d’entre eux s’appuient sur une amphibologie purement accidentelle, due à une particularité de syntaxe : locution à double sens, actif et passif (300 a) ; phrase où, grammaticalement, le sujet peut être pris pour l’objet (300 b)[3] ; de même 300 b et 301 cd.

Un genre de sophisme d’une qualité plus fine est celui qui

  1. F. Horn, Platonstudien, p. 145 sq. — Bonitz n’en comptait que vingt et un.
  2. O. l., p. 108 et suiv.
  3. Sophisme παρ’ ἀμφιβολίαν, Aristote, De soph. el., IV, 4.