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NOTICE

non seulement la marche de l’action, mais aussi et surtout la signification philosophique de l’œuvre. À la fin du premier acte, Socrate prend la parole pour expliquer à Clinias qu’il ne s’agit que d’une sorte de prélude à l’initiation véritable. Il donne à Ctésippe un avertissement analogue à la fin du troisième acte : les sophistes plaisantent ; ils n’ont pas encore abordé sérieusement le sujet. La symétrie des deux endroits saute aux yeux. Elle met fortement en relief les étapes successives de l’entretien, ou, pour mieux dire, elle fait ressortir que la discussion n’avance pas. Ces deux interventions aboutissent à une conclusion du même genre. Socrate clôt la première en priant les sophistes de montrer à Clinias comment il faut s’attacher au savoir et à la vertu. Il réitère cette invitation au terme de son entretien avec le jeune homme. Il y revient enfin après la sortie de Ctésippe, pour reprendre avec Clinias l’enquête interrompue.

Ce rythme se fait sentir à l’intérieur même de certains épisodes. Ainsi dans le second. Une première passe entre Dionysodore et Ctésippe est suivie d’un éclat de Ctésippe, qui proteste avec violence. Un instant arrêtée, la discussion reprend entre Euthydème et Ctésippe, puis entre Dionysodore et Ctésippe. Nouvelle sortie du jeune homme : Socrate doit intervenir pour le rappeler au calme. Cette fois, c’est contre Socrate que se tourne Dionysodore. Mais de nouveau Ctésippe éclate contre l’adversaire, et il faut encore que Socrate s’empresse de l’apaiser.

Ces balancements symétriques, ces arrêts, ces reprises, ces contrastes, dessinent vigoureusement les articulations du dialogue. Un coup d’œil sur la suite des épisodes suffit à montrer comment la progression de l’intérêt y a été ménagée. Quand l’entretien commence, on sait quel est le but à atteindre : les sophistes sont invités à faire preuve de leur savoir en exhortant Clinias à la vertu. Ils acceptent ; ils prennent la parole. Allons-nous entendre l’exhortation promise ? Non. Les deux sophistes, jouant sur les mots et soutenant tour à tour des thèses opposées, réduisent Clinias au silence. Le résultat est entièrement négatif. Mais Socrate rassure Clinias : ce premier engagement n’était qu’un jeu. Pour orienter plus sûrement l’entretien, il va montrer la voie aux sophistes. Le thème posé au début, il le développe à sa manière. Et quand il s’arrête, le problème a pris la forme la plus précise. Au