Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome V, 1.djvu/107

Cette page a été validée par deux contributeurs.
81
NOTICE

sions intéressantes qu’il y aurait à en tirer pour les relations de Platon et de Lysias, en rapprochant du Phèdre le Ménexène. A. Croiset estime que le Ménexène répond très probablement, comme le premier discours de Socrate dans le Phèdre, à un discours de Lysias, dont Platon combattait l’école[1]. Mais peut-on tenir pour certaine l’authenticité de l’Épitaphios ? On fait valoir qu’Aristote le cite avec éloge, d’ailleurs sans en indiquer l’auteur, et que le Pseudo-Plutarque n’hésite pas à l’attribuer à Lysias ; enfin, qu’Isocrate l’a imité[2]. Cependant, après avoir été souvent contestée, en particulier par Valckenaer et Sauppe[3], l’authenticité n’est plus guère admise aujourd’hui[4], depuis le vigoureux plaidoyer de Blass[5].

À supposer d’ailleurs que Platon ait connu le discours de Lysias, et l’ait eu en mémoire quand il écrivait le Ménexène, rien ne prouve avec certitude qu’il l’ait particulièrement visé. Il convient en cette matière d’être circonspect, et de ne pas attacher une signification trop précise à certaines analogies, même frappantes. N’oublions pas que Platon s’attaquait ici à un genre d’éloquence dont le plan et la méthode, le contenu et la forme avaient été fixés par une tradition déjà longue. Rien d’étonnant, par suite, si toutes les productions de cette sorte — discours réellement prononcés, comme celui d’Hypéride, ou simples exercices d’école — offrent entre elles un air de famille et même des ressemblances littérales, qui risquent d’être trompeuses[6]. Cette conclusion nous semble applicable

  1. O. l., p. 62. Höltermann, o. l., p. 98, est, sur ce point, d’un avis analogue ; il croit que Platon exagère à dessein les défauts de la rhétorique de Lysias, mais qu’il cherche à améliorer le contenu du discours critiqué, par des emprunts faits à l’oraison funèbre de Périclès.
  2. M. Bizos, o. l., p. 45. Sans se prononcer nettement en faveur de l’authenticité, M. Bizos fait valoir les raisons qui la rendent soutenable.
  3. Berndt, o. l., p. 6.
  4. Wilamowitz (o. l., p. 127, note 1) estime scandaleux qu’on puisse encore la défendre. Toutefois M. Bizos a très bien montré que les arguments de Blass ne sont pas décisifs. Cf. Hoffmann, o. l., p. 329.
  5. O. l., p. 436 sq.
  6. Voir M. Erdmann, PseudoLysiae oratio funebris, 1881, p. 6 ; Hoffmann, p. 328-329. Trendelenburg, qui croit pourtant que Platon a eu sous le yeux le discours de Lysias, juge le Ménexène dirigé contre l’épitaphios en général (o. l., p. 9). Wendland, o. l., p. 181, tout en considérant le Ménexène comme imité de Gorgias, fait remar-