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PHÈDRE

IV

LE DISCOURS DE LYSIAS ET LE PREMIER DISCOURS DE SOCRATE

I. Le discours de Lysias :
A. est-il authentique ?

Avant d’envisager la structure et le contenu du discours de Lysias[1], un problème singulièrement épineux s’impose à nous : ce discours est-il un pastiche de la main de Platon ? Ou bien celui-ci a-t-il inséré dans son Phèdre une authentique composition de Lysias ?

Entre plusieurs témoignages anciens, tous postérieurs au début de notre ère et qui s’échelonnent du ier siècle à la fin du ve, la plupart n’ont pas plus de signification que notre propre expression « le discours de Lysias », où nous n’impliquons rien dans un sens ou dans l’autre[2]. Deux seulement sont précis et formels : celui de Diogène Laërce, III 25 (iiie siècle), et celui d’Hermias (deuxième moitié du ve). Dans le premier nous lisons que Platon a réfuté le discours de Lysias, « ce qu’aucun philosophe n’avait fait avant lui, après avoir transporté dans son Phèdre ce discours mot à mot (ἐκθέμενος αὐτὸν κατὰ λέξιν) ». Le second affirme comme une chose qu’ « on doit savoir », que ce discours est de Lysias lui-même et, de plus, que c’est dans le recueil des Lettres de Lysias un morceau réputé[3].

  1. Une étude très approfondie en a été faite par H. Weinstock De Erotico Lysiaco, Münster, 1912.
  2. Denys d’Halicarnasse, Ad Cn. Pompeium 126 (ier s.) ; Maxime de Tyr, Diss. XXIV 5 ; Hermogène, De or. forma II 477 (ces deux derniers du iie s.). Pour le témoignage de Fronton, le maître de Marc-Aurèle, voir la note suivante.
  3. Le lexicographe byzantin Suidas (xe s.) parle lui aussi des Lettres de Lysias, dont cinq sur sept étaient adressées à des adolescents ; mais il ne mentionne pas que le morceau du Phèdre fasse partie du recueil. Quant à Fronton, le fait de dire au début de son Ἐρωτικός que c’est son troisième « message » à son élève (σοι… ἐπιστέλλω) et que les deux premiers provenaient de Lysias et de Platon (διὰ Λυσίου καὶ Πλάτωνος ἐπεσταλμένων), ce fait, quoi qu’en pense Thompson (p. 184 sq.), ne peut servir à prouver, ni que