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l’amour des beaux garçons, chacun fait son choix de la manière voulue et, l’objet de ce choix représentant pour lui la divinité même, c’est comme une sorte d’image sainte qu’il se fabrique et qu’il orne, dans l’intention de l’honorer et de lui rendre un culte secret ! Ceux-là e donc, dis-je, qui dépendent de Zeus cherchent que de Zeus soit l’âme de celui qui sera aimé par eux : ils examinent en conséquence si, de sa nature, il est philosophe et apte à conduire, et quand, l’ayant découvert, ils se mettent à l’aimer, ils font tout pour qu’en réalité il soit tel[1]. Par suite, si c’est là un genre d’occupation dans lequel auparavant ils ne se sont pas engagés, à présent qu’ils y ont mis la main, ils s’instruisent à la source où ils en auront quelque possibilité ; par eux-mêmes aussi, ils poursuivent cette recherche. Or, quand ils tiennent la piste, leur effort pour découvrir, par leurs moyens personnels, la nature de leur propre Dieu 253 est couronné de succès, parce que c’est pour eux une intense nécessité de regarder dans la direction de ce Dieu. Lorsqu’enfin ils l’atteignent par le souvenir et que le Dieu dont il s’agit les possède, c’est à lui qu’ils empruntent leurs façons habituelles et l’occupation de leur activité, pour autant qu’il est possible à l’homme de participer à la divinité. Bien entendu, ce résultat, c’est au bien-aimé qu’ils le rapportent, et ils l’en chérissent encore davantage ; ont-ils même puisé à la source de Zeus, pareils aux Bacchantes ils reversent ce qu’ils y ont pris sur l’âme du bien-aimé, le rendant ainsi le plus complètement possible semblable au Dieu qui est le leur ! Tous ceux qui, d’autre part, ont suivi dans b le cortège d’Hèra cherchent un aimé de type royal, et, quand ils l’ont trouvé, en tout ils procèdent à son égard de la même façon. Ceux qui relèvent d’Apollon ainsi que de chacun des Dieux, réglant leur marche sur la sienne, cherchent que leur propre mignon ait un naturel assorti. Et, quand ils ont acquis ce résultat en imitant eux-mêmes leur Dieu tout comme en conseillant leurs bienaimés et en les disciplinant, ils les amènent à rapporter à ce Dieu l’emploi qu’ils font de leur activité ainsi que leur aspect extérieur. Cela dépend de la capacité de chacun : de leur part il n’y a point d’envie, pas de mesquine malveillance

  1. Il se peut que ceci vise Dion : le mot diios (de Zeus) serait un