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parures d’emprunt, dont toute l’occupation sera ce qui par ailleurs s’y rattache. Toutes choses manifestes et ne valant pas la peine qu’on aille plus avant, mais plutôt, après avoir sur un point particulier défini le principal, que l’on passe à un autre point : un corps de cette sorte, à la guerre comme dans toute autre nécessité importante, inspire en effet l’audace aux ennemis, tandis que les amis, et les amoureux justement, tremblent pour lui !

« Voilà, bien sûr, un point à laisser de côté comme manifeste, pour parler de celui qui vient ensuite : quelle utilité ou quel dommage, concernant e ce que nous avons à nous, devons-nous attendre de la société comme de la direction de l’homme qui aime[1] ? Eh bien ! oui, voici qui ne fait doute pour personne, pour l’amoureux surtout : tout ce qu’à lui l’aimé a de plus cher, de plus bienveillant à son égard, de plus divin, c’est de cela que pour celui-ci l’amoureux souhaiterait par-dessus tout la perte ; père, mère, parents, amis, il ne demanderait pas mieux que de l’en voir privé : autant d’empêcheurs, pense-t-il, autant de censeurs de l’extrême agrément 240 de son commerce avec lui ! Ce n’est pas tout : ce qu’il jugera, c’est qu’un aimé qui a du bien à soi, soit en argent, soit en propriété d’autre sorte n’est, ni de prise pareillement aisée, ni, une fois pris, aussi facile à manier ; il s’ensuit que, de toute nécessité, un amoureux est jaloux que ses amours aient du bien et, au contraire, ravi de leur ruine. Il y a plus encore : point de mariage pour ses amours, point d’enfants, point de foyer et le plus longtemps possible ! voilà la condition que leur souhaiterait l’amoureux[2], puisque son désir est de se réserver le plus longtemps possible l’égoïste jouissance de ce doux fruit.

    demi-jour, c’est en grec une ombre mêlée par opposition à ce qui est appelé le soleil pur. — Plus loin il qualifie de sèches les sueurs d’un athlète, par opposition à celles qui suivent le bain ; c’est de même à sec que l’athlète se frotte d’huile, à la différence de qui vient de se baigner.

  1. Le troisième point est relatif aux avantages extérieurs, soit de naissance et de famille, soit de fortune.
  2. C’est ce que l’Aristophane du Banquet (192 b) dit des hommes qui, provenant de la bissection d’un mâle primitif, cherchent en aimant les garçons à retrouver la moitié d’eux-mêmes.