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froid. — C’est e exact, dit-il. — Il se peut donc, reprit-il, que dans certains exemples analogues il en soit de telle sorte, que non seulement la forme en elle-même ait droit à son propre nom pour une durée éternelle, mais qu’il y ait encore autre chose qui, tout en n’étant pas la forme dont il s’agit, possède cependant le caractère de celle-ci, et cela pour l’éternité de sa propre existence. Mais voici encore des cas où peut-être s’éclaircira ce que je dis. De l’impair en effet est sans doute toujours inséparable en droit ce nom que nous prononçons à présent ; n’est ce pas ? — Hé ! absolument. — Est-ce qu’il en est ainsi de cette réalité seulement (oui, voilà ma question), ou bien aussi d’une autre qui, sans être l’impair lui-même, 104 en porte cependant de droit toujours le nom, joint à son propre nom, car sa nature est telle que jamais l’impair ne lui fait défaut ? Or, dis-je, c’est quelque chose comme cela qui se passe pour le trois, et bien d’autres fois. Ne considère que le cas du trois : n’es-tu pas d’avis, et que son propre nom doit toujours servir à le désigner, et aussi celui de l’impair, bien que l’impair ne soit pas cela même qu’est le trois ? Eh bien ! pourtant, si c’est à sa façon la nature du trois, c’est aussi celle du cinq et de la moitié tout entière de la numération, que, tout en n’étant pas cela même qu’est l’impair, chacun de ces nombres b soit toujours impair. Le deux d’autre part, et le quatre, et la totalité encore de l’autre rangée de la numération, ne sont pas cela même qu’est le pair, et néanmoins chacun de ces nombres est toujours pair. En conviens-tu ou non ? — Comment s’y refuser en effet ? dit-il.

— Eh bien ! donc, reprit Socrate, sois attentif à ce que j’ai l’intention de montrer. Voici : manifestement il n’y a pas que nos premiers contraires pour ne pas se recevoir l’un l’autre ; il y a aussi tout ce qui, sans être mutuellement contraire, possède toujours ces contraires et qui vraisemblablement ne recevra pas non plus telle qualité qui serait le contraire de celle qui existe en ces sujets ; mais, à l’approche de cette qualité, le sujet cesse d’être ou bien c cède la place[1]. Ne dirons-nous pas du trois qu’il cessera d’exister, qu’il

    peuvent perdre sans cesser d’être ce qu’elles sont, donc d’une relation essentielle et qui a son fondement propre dans l’Idée.

  1. Ainsi deux choses, dont la qualité essentielle est contraire, suivent la loi des contraires tout en n’étant pas des contraires.