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MÉNON

Anytos. — Ils sont loin d’être fous, Socrate : les fous, ce sont les jeunes gens qui les paient, et encore plus les parents qui leur livrent leurs enfants ; b mais plus que tous, et de beaucoup, les cités qui les accueillent, quand elles devraient chasser sans exception tout individu qui fait ce métier, citoyen ou étranger.

Socrate. — Quelque sophiste t’a-t-il fait du tort, Anytos, ou qu’as-tu pour t’irriter si fort contre eux ?

Anytos. — Jamais de la vie, par Zeus, je n’en ai fréquenté aucun, et jamais je ne permettrai qu’un seul des miens les approche.

Socrate. — Alors, tu ne les connais pas du tout ?

Anytos. — Puissé-je ne jamais les connaître !

Socrate. — Eh bien, je t’admire ! Comment c peux-tu juger si leur métier est bon ou mauvais, puisque tu n’en as aucune expérience personnelle ?

Anytos. — Rien de plus facile : expérience ou non, je sais ce qu’ils valent.

Socrate. — C’est sans doute que tu es devin, Anytos : autrement, je ne vois pas, d’après tes propres paroles, comment tu pourrais les connaître[1]. Au reste, ce que nous cherchons, ce ne sont pas les maîtres qui pourraient gâter Ménon par leur enseignement — mettons, d si tu le désires, que ce sont les sophistes : indique-nous seulement et rends à l’ami de ta famille que voici le service de lui préciser quels sont, dans cette grande ville d’Athènes, les maîtres qui lui apprendront à se signaler par le genre de vertu que je t’ai dit.

Anytos. — Pourquoi ne les lui indiques-tu pas toi-même ?

Socrate. — Je lui ai bien indiqué ceux que je considérais comme des maîtres en cette matière ; mais il se trouve que mes indications étaient sans valeur, si je dois t’en croire, et peut-être as-tu raison. e Dis-lui donc à ton tour auxquels des Athéniens il doit s’adresser : dis le nom que tu préfères.

    n. 1) : suivant qu’on voit une allusion à sa mort dans un fragment du Palamède d’Euripide (frt. 588), représenté en 415, ou dans son Ixion (cf. Diog. L. 9, 55), représenté entre 410 et 408, la date de sa naissance se trouve fixée aux environs de 485 ou de 480-478.

  1. Homme politique comme Calliclès, bien que de tendances différentes, Anytos méprise comme lui (Gorg. 520 a) les Sophistes. Mais