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LYSIS

qui, voyant un certain nombre d’assistants autour de nous, alla se cacher derrière eux de manière à n’être pas aperçu de Lysis, qu’il craignait de fâcher, et il resta debout pour écouter.


Début de la conversation avec Ménexène, puis Lysis. Pourquoi les enfants obéissent aux parents.

Je regardai alors Ménexène et je lui dis : — « Fils de Démophon, lequel de vous deux est le plus âgé ? » — « Nous en disputons, dit-il. » — « Disputez-vous aussi sur la question de savoir lequel est le mieux né ? » — « Assurément. — « Ou le plus beau ? » — Tous deux se mirent à rire. Je repris : — « Je ne vous demanderai pas lequel est le plus riche, car vous êtes amis, n’est-ce pas ? » — « Très amis, » répondirent-ils. — « Eh bien, tout est commun entre amis, dit-on[1], de sorte que vous ne pouvez être inégaux à cet égard, si ce que vous dites de votre amitié est vrai. » — Ils en tombèrent d’accord.

J’allais leur demander lequel était le plus juste et le plus savant, lorsque je fus interrompu par le départ de Ménexène, qu’on vint chercher de la part du pédotribe : je crois qu’il avait un rite religieux à accomplir[2].

Après qu’il fut parti, j’interrogeai Lysis : — « Je pense, Lysis, que ton père et ta mère t’aiment fort ? » — « Sans doute. » — « Ils te souhaitent donc le plus grand bonheur possible ? » — « Évidemment. — « Crois-tu qu’on puisse être heureux si l’on est esclave et hors d’état de faire ce qu’on veut ? » — « Non certes. »

— « Par conséquent, si ton père et ta mère te chérissent, s’ils désirent ton bonheur, ils cherchent tous les moyens de t’assurer ce bonheur ? » — « Assurément. » — « Ils te laissent donc faire toutes tes volontés sans jamais te réprimander ni te rien défendre ? » — « Pas le moins du monde, Socrate ; ils me défendent une foule de choses. »

— « Que me dis-tu ? Ils veulent ton bonheur et t’empê-

  1. Cette locution proverbiale semble avoir été d’abord une maxime pythagoricienne.
  2. La surveillance des rites religieux propres à la palestre était une des fonctions du pédotribe. À son rôle essentiel de maître de gymnastique, il ajoutait aussi parfois une sorte de direction médicale (cf. Rép., III, 406 a‑b).