EUTHYPHRON
Prologue.
Euthyphron. — 2 Que t’arrive-t-il, Socrate ? D’où vient que tu délaisses le Lycée, où tu aimais à causer, et que maintenant tu te tiens ici, près du Portique royal[1] ? J’ai peine à croire que tu aies, comme moi, quelque procès devant l’archonte-roi ?
Socrate. — Mon affaire, Euthyphron, n’est pas ce qu’on appelle proprement à Athènes un procès ; c’est une poursuite criminelle.
Euthyphron. — Que dis-tu ? Quelqu’un donc aurait porté plainte contre toi ? b car je ne peux t’imputer, à toi, d’accuser personne.
Socrate. — Non, en effet.
Euthyphron. — Ainsi, il y a vraiment quelqu’un qui t’accuse ?
Socrate. — Oui, positivement.
Euthyphron. — Qui est cet homme ?
Socrate. — Ma foi, Euthyphron, je ne le connais pas très bien moi-même ; cela tient sans doute à ce qu’il est jeune et sans notoriété. On le nomme, si je ne me trompe, Mélétos ; il est du dème Pitthos. Ne connaîtrais-tu pas, par hasard, un certain Mélétos de ce dème, avec des cheveux lisses, peu de barbe, un nez crochu ?
Euthyphron. — Non, je ne vois pas cela, Socrate. Mais, dis-moi, de quoi enfin peut-il bien c t’accuser ?
- ↑ Le Portique royal était l’édifice où siégeait l’Archonte-roi, de qui relevait partiellement la juridiction criminelle.