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d'un étranger, ce n'est pas un dieu que tu nous amènes, suivant ce que dit Homère : que les dieux, et surtout celui qui protège les étrangers, se sont faits maintes fois les compagnons des mortels justes et vertueux, pour venir observer les iniquités et la bonne conduite des hommes[1]. Ainsi, il se pourrait bien que tu eusses en ce moment pour compagnon quelqu'un de ces êtres supérieurs, qui serait venu examiner par lui-même et réfuter nos misérables raisonnements, une sorte de dieu de la réfutation.

THÉODORE.

Non, Socrate, ce n’est pas là le caractère de cet étranger ; il est plus indulgent que les disputeurs de profession. Quant à moi, si je ne vois pas un dieu en lui, du moins je le tiens pour divin ; je tiens pour tel tout philosophe.

SOCRATE.

Et tu as raison, mon ami. Je crains seulement que cette race d’hommes ne soit guère plus facile à reconnaître que la race même des dieux. Ces personnages (je ne parle pas des faux philosophes, mais des vrais) voyagent de ville en ville, en laissant tomber d’en haut leurs regards sur la vie qu’on mène en ces régions inférieures, et ignorance les fait paraître

  1. Homère, Od„ VII, 485 ; IX, 270.