Socr. Si tu veux, je te répéterai aussi ce que m’a dit Gobryès le mage. Il prétend qu’à l’époque de l’expédition de Xerxes, son grand-père, de même nom que lui, envoyé à Délos pour garder cette île où naquirent les deux divinités[1], apprit de certaines tables d’airain, apportées de chez les Hyperboréens par Opis[2] et Hécaergos, que l’âme, après sa séparation d’avec le corps, va dans le séjour des ténèbres, sa demeure souterraine où est le royaume de Pluton, aussi grand que l’empire de Jupiter. Car la terre occupe le milieu de l’univers ; et le monde étant sphérique, les dieux célestes habitent l’hémisphère supérieur et les dieux infernaux l’autre hémisphère ; et si les premiers sont frères, les autres sont fils de frères. Le Vestibule de Pluton est fermé de portes et de serrures en fer. Quand ces portes sont ouvertes, on voit le fleuve Achéron, puis le Cocyte qu’il faut traverser tous deux pour arriver jusqu’à Minos et à Rhadamanthe, dans la plaine qui s’appelle le champ de la vérité. Là siègent des juges qui examinent quelles ont été la conduite et la vie de ceux qui arrivent, quand ils étaient sur la terre. Le mensonge est impossible. Ceux qui ont été inspirés par un bon démon pendant leur vie vont dans la demeure des justes, où croissent des fruits de toute espèce, où coulent des sources d’une eau limpide, où sont des prairies émaillées de fleurs, des conversations philosophiques, des théâtres pour les poètes, des chœurs de danse, des concerts, des repas délicieux que personne n’apprête, enfin, une paix continuelle et une joie sans mélange. Il n’y a ni chaleurs ni froids excessifs ; un air tempéré circule attiédi par de doux rayons de soleil. Les initiés président encore