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LE BANQUET.

de ma personne. Dans cette idée, renonçant à l’usage où j’étais de ne me trouver avec lui qu’en présence de l’homme chargé de m’accompagner, [217b] je renvoyai ce dernier, et nous nous trouvâmes seuls ensemble. Il faut ici que je vous dise la vérité tout entière : prêtez-moi donc toute votre attention, et toi, Socrate, reprends-moi si je ments.

Je me trouvai donc en tête à tête avec lui : je m’attendais qu’il ne tarderait guère à engager ce genre de propos que tout amant adresse à son bien-aimé quand il est seul avec lui, et je m’en réjouissais déjà. Mais il n’en fut rien absolument. Socrate demeura toute la journée, s’entretenant avec moi à son ordinaire, et puis il se retira. Après cela, je le provoquai à des exercices de gymnastique : [217c] je m’essayai avec lui, espérant gagner par là quelque chose. Nous nous exerçâmes souvent, et nous luttâmes ensemble sans témoins. Que vous dirai-je, mes amis ? je n’en étais pas plus avancé. Voyant qu’ainsi je n’obtenais rien, je me décidai à l’attaquer vivement, à ne point lâcher prise ayant une fois commencé, et à savoir enfin à quoi m’en tenir. Je l’invitai à souper comme font les amans qui tendent un piège à leurs bien-aimés. Il ne se rendit pas d’abord [217d] à mes instances : mais avec