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LE BANQUET.

l’amour de quelque chose ou de rien. — De quelque chose certainement. [200a] — Retiens bien ce que tu avances là, et souviens-toi de quoi l’Amour est amour selon toi. Mais, avant d’aller plus loin, dis-moi si l’Amour désire la chose dont il est amour. — Il la désire. — Mais reprit Socrate, est-il possesseur de la chose qu’il désire et qu’il aime ; ou bien ne la possède-t-il pas ? — Vraisemblablement, reprit Agathon, il ne la possède pas. — Vraisemblablement ! Vois plutôt s’il ne faut pas nécessairement que celui qui désire une chose, manque de la chose qu’il désire, [200b] ou bien qu’il ne le désire pas, s’il n’en manque pas. Pour moi, je trouve cela tout-à-fait nécessaire. Et toi que t’en semble ? — Je suis de ton avis. — À merveille. Par exemple, celui qui est grand, voudrait-il être grand, et celui qui est fort, être fort ? — Impossible, d’après ce dont nous sommes convenus. — Car étant grand et fort, il ne manque ni de grandeur ni de force. — Tu as raison. — Si celui qui est fort, reprit Socrate, voulait être fort, celui qui est agile, agile, et celui qui est bien portant, bien portant… car peut-être y a-t-il quelqu’un qui ne trouverait pas cette hypothèse absurde, savoir qu’il y a des gens qui possédant la force, l’agilité et la santé, [200c] désirent encore ce qu’ils possèdent ; j’in-