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LE BANQUET.

plane et se repose sur tout ce qu’il y a de plus tendre : car c’est dans les âmes des dieux et des hommes qu’il fait sa demeure. Et encore n’est-ce pas dans toutes les âmes indistinctement ; rencontre-t-il un cœur dur, il passe et ne s’arrête que dans un cœur tendre. Or, s’il ne touche jamais de son pied ou du reste de son corps que la partie la plus délicate des êtres les plus délicats, ne faut-il pas qu’il soit doué lui-même de la délicatesse la plus exquise ? [196a] Il est donc le plus jeune et le plus délicat des dieux ; j’ajoute qu’il est d’une essence toute subtile : autrement il ne pourrait pénétrer partout, se glisser inaperçu dans tous les cœurs et en sortir de la même manière. Et qui ne reconnaîtrait une subtile essence à la grâce qui, de l’aveu commun, distingue l’Amour ? Amour et laideur sont partout en guerre. Peut-on douter de la fraîcheur de son teint, lui qui ne vit que parmi les fleurs ? Jamais [196b] l’Amour ne se fixe dans rien de flétri, corps ou âme ; mais où il trouve des fleurs et des parfums, c’est là qu’il se plaît et qu’il s’arrête. En voilà assez pour montrer la beauté de ce dieu, je tairai le reste pour parler de sa vertu. Son plus grand avantage est qu’il ne peut recevoir aucune offense de la part des hommes ni des dieux, et que ni dieux ni hommes ne sau-