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LE BANQUET.

tôt les deux autres ; [193e] car Agathon et Socrate sont les seuls qui restent.

« Je t’obéirai, dit Éryximaque, et d’autant plus volontiers que ton discours m’a charmé, mais à un tel point que, si je ne connaissais combien sont éloquents Socrate et Agathon en matière d’amour, je craindrais fort qu’ils ne demeurassent court, la matière paraissant épuisée par tout ce qui a été dit jusqu’à présent. Cependant j’attends encore beaucoup d’eux. [194a] — Tu t’es très-bien tiré d’affaire, Éryximaque, dit Socrate ; mais, si tu étais où j’en suis et où j’en serai plus encore quand Agathon aura parlé, tu tremblerais et serais tout aussi embarrassé que moi. — Tu veux donc, ô Socrate, dit Agathon, me jeter un sort, et me troubler l’esprit en me faisant croire que l’assemblée est dans l’attente, comme si je devais dire les plus belles choses. — J’aurais bien peu de mémoire, Agathon, reprit Socrate, [194b] si toi, que j’ai vu monter avec tant de fermeté sur la scène, environné des comédiens, et, regardant en face une si grande assemblée, réciter tes vers sans aucune émotion, j’allais croire que tu puisses te troubler pour quelques personnes comme nous ! — Ah ! je te prie, répondit Agathon, ne crois pas, Socrate, que je sois tellement enivré du théâtre, que j’ignore combien, pour un