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LE BANQUET.

petit nombre de privilégiés. Qu’Éryximaque ne s’avise pas de critiquer ces dernières paroles, comme si elles regardaient Pausanias et Agathon ; car peut-être [193c] sont-ils de ce petit nombre et appartiennent-ils l’un et l’autre à la nature mâle et généreuse. Quoi qu’il en soit, je suis certain que nous serons tous heureux, hommes et femmes, si l’amour donne à chacun de nous sa véritable moitié et le ramène à l’unité primitive. Cette unité étant l’état le meilleur, on ne peut nier que l’état qui en approche le plus ne soit aussi le meilleur en ce monde, et cet état, c’est la rencontre et la possession d’un être selon son cœur. Si donc le dieu qui nous procure ce bonheur a droit à nos louanges, [193d] louons l’Amour, qui non-seulement nous sert en cette vie, en nous faisant rencontrer ce qui nous convient, mais qui nous offre aussi les plus grands motifs d’espérer qu’après cette vie, si nous sommes fidèles aux dieux, il nous rétablira dans notre première nature, et, venant au secours de notre faiblesse, nous donnera un bonheur sans mélange.

« Voilà, Éryximaque, mon discours sur l’amour ; il est différent du tien, mais, je t’en conjure encore une fois, ne t’en moque point, afin que nous puissions entendre les autres, ou plu-