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LE BANQUET.

l’éloge de l’Amour, [177b] qui est pourtant un si grand dieu ? Regardez un peu les sophistes habiles ; ils composent tous les jours de grands discours en prose à la louange d’Hercule et des autres demi-dieux, témoin le fameux Prodicus[1]. Passe pour cela. J’ai même vu un livre qui portait pour titre : l’Éloge du sel, où le savant auteur développait les merveilleuses qualités du sel, [177c] et les grands services qu’il rend à l’homme. En un mot, tu verras qu’il n’y a presque rien au monde qui n’ait eu son panégyrique. Comment se peut-il donc faire que, parmi cette profusion d’éloges, on ait oublié l’Amour, et que personne n’ait entrepris de louer un dieu qui mérite tant d’être loué ? Pour moi, continua Éryximaque, j’approuve l’indignation de Phèdre. Je veux donc lui payer mon tribut, et lui faire ma cour ; et en même temps il me semble qu’il siérait très bien à une compagnie telle que la nôtre d’honorer l’Amour. [177d] Si cela vous plaît, il ne faut point chercher d’autre sujet de conversation. Chacun prononcera de son mieux un discours à la louange de l’Amour. On fera le tour, à commencer par la droite. Ainsi Phèdre parlera le

  1. Hercule entre la volupté et la vertu, par Prodicus. Xénoph. Mem. II, i. Cicer. De officiis, I, 31.