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SOCRATE.

Ainsi tu ne juges pas que les sophistes soient des maîtres de vertu ?

MENON.

Je ne sais que te répondre là-dessus, Socrate. Je suis à cet égard dans le même cas que bien d’autres, tantôt ils me paraissent tels, tantôt non.

SOCRATE.

Tu sais bien que vous n’êtes pas les seuls, toi et les autres politiques, qui pensiez tantôt que la vertu peut s’enseigner, tantôt qu’elle ne le peut pas ; et [95d] que le poète Théognis dit la même chose ?

MENON.

Où donc ?

SOCRATE.

Dans ses élégies, où il dit :

Bois, mange avec ceux qui jouissent d’un grand crédit ;
Tiens-toi auprès d’eux, et tâche de leur plaire ;
Car tu apprendras de bonnes choses avec les bons : mais si [95e] tu fréquentes
Les méchants, tu perdras même ce que tu as de raison[1].

Vois-tu que dans ces vers il parle comme si la vertu pouvait s’enseigner ?

  1. Theogn., Sentent., v. 33.