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SOCRATE.

Mon cher ami, les prêtres du temple de Jupiter de Dodone disent que les premières prophéties venaient d’un chêne : ces hommes antiques n’étaient pas si savants que vous autres modernes, et ils consentaient bien, dans leur simplicité, à n’écouter qu’un chêne ou une pierre, pourvu que le chêne ou la pierre [275c] dît vrai. Toi, tout au contraire, tu demandes quel est celui qui parle et d’où il est ; tu n’examines pas seulement si ce qu’il dit est véritable ou faux.

PHÈDRE.

Tu as raison de me reprendre, et il me semble qu’au sujet de l’écriture le Thébain a raison.

SOCRATE.

Celui donc qui prétend laisser l’art consigné dans les pages d’un livre, et celui qui croit l’y puiser, comme s’il pouvait sortir d’un écrit quelque chose de clair et de solide, me paraît d’une grande simplicité ; et vraiment il ignore l’oracle d’Ammon, s’il croit que des discours [275d] écrits soient quelque chose de plus qu’un moyen de réminiscence pour celui qui connaît déjà le sujet qu’ils traitent.

PHÈDRE.

C’est fort juste.