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rencontré en route un certain faux amour qu’il n’a pu s’empêcher d’accabler d’injures bien méritées ; l’autre a tourné à droite, et dans son chemin il a rencontré un autre amour qui porte le même nom que le premier, mais qui est divin, [266b] qu’il a pris pour matière de ses éloges, et qu’il a vanté comme la source de tous les biens.

PHÈDRE.

Tu dis vrai.

SOCRATE.

Pour moi, mon cher Phèdre, j’affectionne singulièrement cette manière de diviser les idées, et de les rassembler tour à four, pour être plus capable de bien penser et de bien parler ; et quand je crois apercevoir dans quelqu’un une intelligence qui peut embrasser à la fois l’ensemble et les détails d’un objet, je marche avec respect sur ses traces comme sur celles d’un dieu[1]. Ceux qui ont ce talent, Dieu sait si j’ai tort ou raison, [266c] mais enfin jusqu’ici je les appelle dialecticiens. Mais ceux qui se seraient formés à ton école et à celle de Lysias, dis-moi, comment faudrait-il les appeler ? Serait-ce là cet art de la parole qui a rendu Thrasymaque et les

  1. Fin de vers d’Homère, Odyss., V, 193 ; VIII, 38.