Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/483

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le reste, car mon inspiration pourrait se perdre. En tout cas ce sera l’affaire du dieu qui me possède. Je continue de parler à notre bel enfant. Ainsi, mon cher, l’objet qui nous occupe est maintenant bien connu, bien déterminé, quant à sa nature. Passons [238e] à ses conséquences. Examinons, sans perdre de vue nos principes, le bien ou le mal qui doivent résulter des complaisances qu’on peut avoir soit pour un amant, soit pour un ami.

Celui que le désir domine, l’esclave du plaisir, doit nécessairement chercher dans la société de celui qu’il aime le plus de plaisir possible. Or, un esprit malade trouve son plaisir dans une entière condescendance à ses volontés ; tout ce qui l’emporte sur lui, tout ce qui lui résiste lui est odieux. [239a] Donc l’amant ne verra jamais volontiers un supérieur ou même un égal dans celui qu’il aime ; il travaillera toujours à l’abaisser au-dessous de lui. L’ignorant est au-dessous du savant, comme le poltron est au-dessous du brave, comme celui qui ne sait point parler est au-dessous de l’orateur, comme celui qui n’a pas d’esprit est inférieur à celui qui en a. Toutes ces causes d’infériorité soit naturelles soit accidentelles feront donc plaisir à l’amant s’il les ren-