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SOCRATE.

Venez donc à ma voix, muses Ligies, soit que vous deviez ce surnom au caractère de vos chants, ou que vous l’ayez emprunté aux Ligyens, enfants de l’harmonie[1] ; soutenez-moi dans le discours que me demande impérieusement mon bel ami, [237b] sans doute pour relever par un nouveau triomphe la gloire de son cher Lysias.

Il y avait un bel enfant, disons mieux, un charmant jouvenceau, qui traînait à sa suite un grand nombre d’adorateurs. Un d’eux, non moins amoureux mais plus fin que les autres, trouva le moyen de lui persuader qu’il n’avait point

  1. Hermias : « On appelle les Muses Ligies par deux raisons, l’une tirée du caractère de leurs chants, l’autre de l’histoire ; et Platon les a rapportées toutes deux. L’histoire dit qu’il y a un peuple de l’Occident nommé Ligyens (les Liguriens, habitants des bords du Pô. Pausan., I), parce qu’il est tellement musicien qu’il fait de la musique même dans les combats, et qu’une partie de l’armée prend part à l’action tandis que l’autre chante. Par le caractère ligyen du chant des Muses, il ne faut pas entendre un caractère spécial ou mode ligyen, comme le mode phrygien ou dorien, mais un caractère général de douceur et d’harmonie, λιγυρόν. — Λίγεια pour λιγυρά, comme épithète des Muses, n’est pas très rare. Voyez deux vers de Stésichore, l’un dans Eustathe, Iliad., I ; l’autre dans Strabon, VIII ; le premier vers de l’hymne XVII d’Homère et le deuxième de l’hymne XIV.