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ment compassés ? Si tu veux le juger pour le fond des choses, je m’en rapporterai à ton avis ; car la faiblesse de mes moyens ne m’a pas permis d’apprécier [235a] la solidité de ses raisons. Je n’ai fait attention qu’au style. Or, sous ce rapport, je doute que Lysias soit parfaitement content de son ouvrage ; car il me semble, à moins que tu n’en juges autrement, qu’il est revenu deux ou trois fois sur les mêmes idées, ce qui ressemble à de la sécheresse. Mais peut-être Lysias s’est-il peu inquiété de ce léger défaut ; peut-être même s’est-il fait un jeu de nous montrer qu’il pouvait exprimer une même chose de deux ou plusieurs manières, et toujours avec la même élégance ?

[235b] PHÈDRE.

Tu n’y penses pas, Socrate. Le principal mérite de ce discours, c’est précisément de dire tout ce que le sujet comporte. L’orateur n’y a rien omis, et l’on ne saurait rien dire de plus complet ni de plus intéressant sur la même matière.

SOCRATE.

Ici je ne puis plus être de ton avis ; car je trouverais dans l’antiquité des sages, hommes et femmes, qui ont parlé ou écrit sur le même sujet, et qui me reprocheraient d’avoir eu pour ton opinion trop de condescendance.