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de chose de commun avec la nature et tient presque tout de l’art ; par cette raison la législation ne vient pas de la nature, mais de l’art, dont les ouvrages n’ont rien de vrai.

CLINIAS.

Comment cela ?

L’ATHÉNIEN.

Premièrement, mon cher ami, à l’égard des dieux, ils prétendent qu’ils n’existent point par nature, mais par art et en vertu de certaines lois, qu’ils sont différens dans les différens peuples, selon que chaque peuple s’est entendu avec lui-même en les établissant ; que le beau et le bien sont autres suivant la nature, et autres suivant la loi ; que pour ce qui est du juste, rien absolument n’est tel par nature ; mais que les hommes sont toujours partagés de sentimens et changent sans cesse d’idées à cet égard ; que ces nouvelles idées sont la mesure du juste à l’époque où elles apparaissent, tirant leur origine de l’art et des lois, et nullement de la nature. Telles sont, mes chers amis, les maximes que nos sages, soit dans la vie privée soit comme poètes, débitent à la jeunesse, soutenant que rien n’est plus juste que ce qu’on emporte par la force[1]. De là l’impiété se glisse dans le cœur des jeunes gens, lorsqu’ils viennent

  1. Voyez le Gorgias.