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en même temps très-riches et vertueux, à prendre ce terme de riche dans le sens qu’on lui donne communément, et on entend par là ce petit nombre d’hommes qui possèdent en abondance cette sorte de biens qui s’estime à prix d’argent, et qu’un malhonnête homme peut posséder comme un autre. Si cela est ainsi, jamais je n’accorderai que le riche soit véritablement heureux s’il n’est pas vertueux ; et j’ajouterai qu’une grande vertu et de grandes richesses sont deux choses incompatibles. Pourquoi ? me demandera-t-on peut-être. Parce que quiconque ne distingue point le juste de l’injuste, a deux fois plus de facilités pour s’enrichir que celui qui ne veut rien acquérir qu’à juste titre, et que quiconque ne veut faire aucune dépense pour quelque sujet que ce soit, honnête ou non, doit nécessairement épargner le double de l’homme de bien, toujours prêt à dépenser sa fortune pour des sujets honnêtes ; d’où il suit qu’avec la moitié moins de gain et le double de dépense, on ne peut pas devenir plus riche que celui qui a le double de gain et dépense la moitié moins. Or, de ces deux hommes l’un est l’homme de bien ; pour l’autre, il n’est pas mauvais, s’il est économe ; mais quelquefois aussi il est tout-à-fait mauvais : pour homme de bien, il ne saurait jamais l’être,