Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, VII et VIII.djvu/326

Cette page n’a pas encore été corrigée

cette opposition entre nos sentiments de plaisir et de peine et le jugement de notre raison, que j’appelle la dernière ignorance ; et elle est aussi la plus grande, parce qu’elle se rapporte à la partie multiple de l’âme, [689b] celle où résident le plaisir et la peine, et qu’on peut comparer au grand nombre et au peuple dans un État. Je dis donc qu’il y a ignorance lorsque l’âme se révolte contre la science, le jugement, la raison, ses maîtres légitimes ; dans un État, lorsque le peuple se soulève contre les magistrats et les lois ; et de même dans un particulier, lorsque les bons principes qui sont dans son âme n’ont aucun crédit sur lui, et qu’il fait tout le contraire de ce qu’ils lui prescrivent. C’est là l’ignorance [689c] que je regarde, soit dans le corps de l’État, soit dans chaque citoyen, comme la plus funeste ; et non pas celle des artisans en ce qui concerne leur métier. Vous comprenez ma pensée, étrangers ?

CLINIAS.

Oui, et nous la croyons vraie.

L’ATHÉNIEN.

Ainsi posons pour certain et incontestable qu’il ne faut donner aucune part dans le gouvernement aux citoyens atteints de cette ignorance ; et que, quand ils seraient d’ailleurs les